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Développement personnel

Chronique : Phénomène macabre de « l’émigration clandestine », après l’Etat, la grosse part de la société sénégalaise.

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Emigrer, c’est quitter son pays pour un pays étranger dans le but d’y vivre. L’Émigration est clandestine lorsqu’elle est illégale ; autrement dit, irrégulière. Des jeunes sénégalais en quête de pitance, migrent fréquemment de façon clandestine vers d’autres territoires où la vie serait, selon leur entendement, plus prometteuse. Pour des raisons diverses, en l’occurrence politiques et sociales, beaucoup de jeunes sénégalais quittent la patrie dans des conditions tristes pour aller s’installer dans d’autres contrées, dans l’espoir d’y trouver le salut.

Ce phénomène est devenu l’un des plus mortels chez les jeunes de la population sénégalaise, depuis maintenant plusieurs années. Des jeunes, hommes, femmes, enfants, des familles entières ont péri dans les eaux, à bord de pirogues, durant des traversées improbables. Des mères pleurent encore leurs fils partis en sacrifice. Partis pour soulager la famille. Partis pour vivre la vie de leur rêve, à l’image de ce qu’ils voient à la télé et sur les réseaux sociaux. Ils partent avec le consentement familial ou sont partis dans la plus grande discrétion. Ils étaient partis pour l’espoir et leur disparition brutale suscite toujours autant de larmes, de chagrins et de commentaires. Pourquoi ils en sont arrivés là ?

Plusieurs facteurs entrent dans l’apparition d’un phénomène social. Ainsi, les phénomènes sociaux aux causes les plus évidentes peuvent avoir les racines les plus complexes. C’est parce que, les motivations des comportements humains peuvent avoir des sources sombres et lointaines, parfois même inconscientes. Dans les sociétés, lorsque qu’un phénomène apparaît de façon positive, nombre de gens peuvent tenter de façon discrète ou flagrante de faire de la récupération. Inversement, lorsque le phénomène revêt une coloration négative, ils vont, le plus souvent, procéder à une projection, c’est-à-dire, tenter de trouver une réalité autre qu’elle sur laquelle repousser judicieusement la configuration.

En ce qui concerne le phénomène coutumier de l’émigration clandestine des jeunes sénégalais qui partent, de façon suicidaire, vers l’Occident, le premier responsable déclaré reste l’Etat. Pourquoi l’Etat ? Parce qu’il est déjà cette institution qui existe pour prendre et assumer des responsabilités. Pour avoir moins de difficultés à gérer, un Etat conséquent doit anticiper sur les situations. En clair, le rôle de l’Etat est d’alléger, de tout son pouvoir légitime, les souffrances de son peuple, en améliorant leurs conditions de vie. Concrètement, tout ce que l’Etat pose comme acte doit avoir comme finalité, la création d’un cadre collectif de vie meilleure, c’est-à-dire, plus juste et plus sûr.

Dans cette perspective, il est raisonnable que l’Etat du Sénégal soit la personne morale la plus visée dans ce phénomène. Cependant, les manquements notoires et caractérisés dans le rôle de l’Etat ne sont pas les seules voire les vraies raisons de l’amplification et de la résilience du phénomène de l’émigration. Le désespoir grandissant des promesses politiques liées à la formation et à l’emploi n’est pas le seul facteur de l’émigration massive, clandestine et suicidaire des jeunes sénégalais. L’Etat n’est pas la cause unique de tout le désarroi qui conduit les jeunes sénégalais à braver la mer.

Après la responsabilité de l’Etat, il va falloir s’arrêter sur le facteur que constitue la société sénégalaise en tant que cadre de relation humaine dans laquelle évoluent les jeunes migrants en question. L’Etat ne peut être dédouané. Seulement, bien identifier les causes d’un mal est essentiel pour espérer le soigner. L’émigration clandestine n’est pas la seule faute d’un Etat faible qui ne crée pas de vraies opportunités pour sa population majoritairement jeune. En effet, le mal de l’Etat est un handicap qui devient encore plus insupportable lorsque s’y ajoute l’hypocrisie sociale sénégalaise.

La société sénégalaise est un modèle qui vexe et qui met mal à l’aise ses membres démunis à travers toute sorte de mécanisme et d’évènement. La majorité des jeunes ont affaire à une société qui ne respecte pas ses membres aux revenues faibles, qui ne les écoute pas, qui ne leur accorde aucune considération, quel que soit leur âge, et qui le leur montre à chaque fois que l’occasion se présente. C’est aussi une société qui n’applique ses censures qu’avec ceux qui n’ont pas les arguments financiers de leur bonne foi. Les jeunes débrouillards restés au pays ont l’habitude de se voir refuser, par leur société, tout ce qu’elle accepte pour les « toubab »[1] et les « modou-modou »[2]. La société sénégalaise est une société qui crée des complexes, des frustrations et des rancœurs, qui trahit sans réserve les amitiés et les amours des jeunes pour des intérêts familiaux à résonance pécuniaire.

A y voir de près, il y a beaucoup plus pesant dans la conscience d’un jeune que d’avoir des qualifications sans trouver un travail conforme ou sans trouver de travail du tout. Il y a beaucoup plus insupportable dans la conscience d’un jeune que de devoir chercher du travail tous les matins dans la douleur. Il y a beaucoup plus indigne dans la conscience d’un jeune que de gagner un salaire misérable.

La vie devient un enfer avant la mort, lorsqu’il s’agit de supporter les jugements et le regard accusateur de la société, des parents et des proches ; lorsque les autres voient en toi une charge supplémentaire, une personne qui surcharge sans jamais alléger de sa présence. Arrive alors le moment de bouger, au sens propre, après s’être longtemps décarcassé pour gagner sa vie dignement. Il faut bouger ne serait – ce que pour faire de la place, pour réussir, on verra après. Ce moment arrive pile lorsque tu commences à symboliser le poids familial et l’échec politique communautaire.

Beaucoup de jeunes auraient pu supporter et résister, ils auraient pu démarrer un petit business pour persévérer. Des revenus même faibles devraient, dans la compréhension et le soutien, permettre à son acquéreur de tenir, le temps de trouver mieux. Mais, pour tenir il faut être moralement serein.

Hélas, en terme de pression, la société sénégalaise n’offre pas de cadeau. Même pour quelqu’un qui choisit de se débrouiller, la société lui fait souvent constater qu’il ne peut pas être aussi serein dans sa logique. Beaucoup ont dû entendre que le travail qu’ils font n’est pas pour eux, qu’ils valent mieux, que leurs mamans et papas, après tous les sacrifices, méritent plus. Ici, il demeure une chance énorme et un grand privilège d’avoir des amis, des parents et un entourage qui ne te met pas trop la pression.

En un mot, notre société est un amplificateur de la détresse. Les jeunes chômeurs et démunis trouveront dans le regard et les mots de la société des tortures morales acerbes. Inutiles, encombrants et dépossédés de leur dignité dans une société où la valeur d’un jeune ne se mesure pas à son éducation, son potentiel, ses rapports humains et son réalisme, mais clairement à la quantité de « teranga »[3] dont il est capable pour ses parents et sa famille. Le culte de l’apparence et de la concurrence demande à l’enfant de prouver combien il est devenu une personne capable de faire autant que ses parents. Il doit réhabiliter les fiertés « dogg buumu gathié yi »[4] et rendre à ses parents proches ou lointains, la pièce de leurs monnaies. Il doit le faire, souvent au prix de sa liberté, de sa carrière ou de sa vie. À défaut, il devient lui-même « gathié »[5], figure d’une stérilité sociale dans sa lignée. Alors, certains choisissent, car au Sénégal, on n’a pas seulement dit : « jur mu dè taxuta yaradal, jur luni leng té fajul dara moy yaradal »[6].                                                                                                                

                                                            Seydina Pathé CISSOKHO @ciskovery


[1] Occidentaux, étranger blanc

[2] Emigré

[3] Les bonnes et belles choses qui agréent l’existence.

[4] Honorer et alléger en réglant de façon matérielle  les souffrances, les peines et les privations.

[5] Une honte

[6] Le mauvais sort en matière de progéniture ce n’est pas avoir des enfants qui ne survivent pas, mais c’est avoir mis au monde celui qui est devenu ce grand gaillard incapable de régler des problèmes.

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Développement personnel

Résumé du livre La maîtrise de soi-même par l’autosuggestion consciente d’Émile Coué

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Émile Coué (1857-1926), pharmacien et psychologue français, publie en 1922 cet ouvrage fondateur qui expose sa célèbre « méthode Coué », une approche préventive et curative basée sur l’autosuggestion consciente. Inspirée de ses observations sur l’effet placebo et les travaux de l’École de Nancy (comme ceux de Hippolyte Bernheim), la méthode vise à exploiter le pouvoir de l’imagination pour influencer le corps et l’esprit, en contournant la volonté souvent inefficace.

Coué insiste sur le fait que l’imagination est la faculté dominante de l’humain : « Chaque fois que la volonté et l’imagination sont en lutte, c’est toujours l’imagination qui l’emporte, sans aucune exception. » Le livre est structuré en quatre parties principales, riches en exemples cliniques et en explications théoriques, pour démontrer comment l’autosuggestion peut guérir des maux physiques, moraux ou psychologiques, et même transformer la société.

1. L’être conscient et l’être inconscient

Coué distingue deux entités en nous : l’être conscient (rationnel, mais doté d’une mémoire infidèle) et l’être inconscient (intelligent, avec une mémoire impeccable qui enregistre tout événement, même mineur). L’inconscient est influencé par des idées dominantes, positives ou négatives, qui deviennent des « prophéties autoréalisatrices ». Par exemple, un patient qui craint une maladie peut l’aggraver par cette peur seule, car l’inconscient transforme l’idée en réalité physique. Coué illustre cela par des cas d’hystérie ou de somnambulisme, où l’inconscient commande des actions inconscientes (comme des accès de violence). La clé : imprégner l’inconscient d’idées positives via l’autosuggestion pour harmoniser les deux êtres.

2. La volonté et l’imagination

Contrairement à la croyance populaire, la volonté n’est pas la force motrice principale ; c’est l’imagination qui guide nos actions. Coué explique que forcer sa volonté (par exemple, « je dois guérir ») crée souvent une résistance interne, alors que s’imaginer déjà guéri libère l’énergie nécessaire. Il cite des exemples concrets : un enfant maladif qui grandit de 12 cm et gagne 19 livres en pratiquant l’autosuggestion, ou un homme rhumatisant qui jette ses cannes après une séance. L’imagination, nourrie par des suggestions répétées, active l’inconscient pour produire des effets thérapeutiques, sans effort conscient.

3. La suggestion et l’autosuggestion

La suggestion est une idée imposée à l’inconscient, qui devient autosuggestion quand on se la répète soi-même. Coué la distingue de l’hypnose (qu’il pratique initialement en groupe pour impressionner les patients), en insistant sur son aspect conscient et accessible à tous. Elle est « aussi vieille que le monde », mais nouvelle dans sa forme délibérée. Des cas cliniques abondent : guérison d’ulcères, de paralysies, d’anxiété, ou même de troubles moraux chez des délinquants juvéniles. Coué argue que l’autosuggestion peut réformer les « maisons de correction » en transformant les jeunes en citoyens honnêtes, en remplaçant les idées négatives par des positives.

4. Applications pratiques et éducation

La méthode s’applique au quotidien pour la santé, le moral et l’éducation. Coué recommande une pratique simple : matin et soir, au lit, répéter 20 fois (en comptant sur une corde à nœuds) la formule : « Tous les jours, à tous points de vue, je vais de mieux en mieux. » Sans fixer l’attention, comme une litanie machinale, pour que l’idée s’imprègne dans l’inconscient. Pour des problèmes spécifiques, formuler des suggestions positives précises (ex. : « Mon bras est guéri »). Il étend cela à l’éducation : les enseignants et parents doivent suggérer confiance et succès aux enfants pour éviter les échecs auto-imposés. Coué conclut sur le potentiel social : une société plus heureuse si tous pratiquent cette maîtrise de soi.

Impact et héritage

Ce livre, best-seller mondial, a influencé la pensée positive, la sophrologie, le training autogène et la psychologie positive moderne. Coué, qui soignait en groupes et voyagea jusqu’aux États-Unis, y est vu comme un pionnier de l’autohypnose. Critiqué pour son apparente simplicité, il reste une référence pour le développement personnel : non pas « vouloir » changer, mais « s’imaginer » changé. Le texte est accessible, ponctué d’anecdotes vivantes, et invite à une expérimentation immédiate. Si vous le lisez, commencez par la pratique – c’est son essence !

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Développement personnel

Accepter la Volonté Divine : Un Chemin vers la Paix Intérieure

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Dans le tumulte de la vie quotidienne, où les ambitions personnelles, les défis imprévus et les déceptions se succèdent, il est facile de se sentir perdu. Pour un croyant, cependant, il existe un ancrage profond : l’acceptation de la volonté divine. Cette notion, ancrée dans de nombreuses traditions spirituelles, n’est pas une résignation passive, mais un acte conscient de confiance et de croissance personnelle. Dans cette chronique de développement personnel, explorons comment intégrer cette acceptation dans notre vie pour cultiver une sérénité durable, une résilience accrue et une connexion plus profonde avec notre foi.

Comprendre la Volonté Divine : Au-delà de la Simple Obéissance

La volonté divine n’est pas un caprice arbitraire, mais un plan bienveillant conçu par une force supérieure – Dieu, pour les croyants chrétiens, musulmans ou d’autres confessions monothéistes. Cela implique non seulement de reconnaître que nos plans humains sont limités, mais aussi de voir dans chaque événement une opportunité d’apprentissage spirituel.

En développement personnel, accepter cette volonté signifie shifter notre mindset : passer d’une posture de contrôle absolu à une ouverture confiante. Imaginez un marin qui lutte contre les vents contraires ; en acceptant les courants, il navigue plus efficacement. De même, résister à la volonté divine génère du stress, de l’anxiété et un sentiment d’impuissance. L’accepter, en revanche, libère de l’énergie pour se concentrer sur ce que l’on peut changer : nos réactions, nos attitudes et nos actions alignées avec nos valeurs spirituelles.

Les Bénéfices pour le Développement Personnel

Accepter la volonté divine n’est pas synonyme de fatalisme ; c’est un outil puissant pour l’épanouissement. Voici quelques avantages concrets :

Réduction du Stress et de l’Anxiété : En remettant nos soucis à une puissance supérieure, nous allégeons notre fardeau mental. Des études en psychologie positive montrent que les pratiques de lâcher-prise, comme la prière ou la méditation, diminuent les niveaux de cortisol, l’hormone du stress. Pour un croyant, cela se traduit par une paix intérieure, comme le décrit le Psaume 46:10 : « Arrêtez, et sachez que je suis Dieu. »

Renforcement de la Résilience : Les épreuves – perte d’emploi, maladie, rupture – deviennent des leçons divines plutôt que des échecs personnels. Pensez à l’histoire de Job dans la Bible, qui, malgré ses souffrances, maintient sa foi et en sort transformé. En développement personnel, cela cultive l’humilité et la gratitude, des qualités essentielles pour rebondir.

Amélioration des Relations : Accepter que les autres aient leur propre chemin divin nous aide à lâcher les attentes irréalistes. Cela favorise l’empathie et le pardon, renforçant les liens familiaux et communautaires.

Croissance Spirituelle et Personnelle : Cette acceptation encourage l’introspection : « Qu’est-ce que Dieu essaie de m’enseigner ici ? » Elle pousse à développer des vertus comme la patience et la persévérance, alignées avec des principes comme ceux énoncés dans l’Épître de Jacques (1:2-4) : « Considérez comme un sujet de joie complète, mes frères, quand vous passez par diverses épreuves, sachant que l’épreuve de votre foi produit la patience. »

Étapes Pratiques pour Intégrer l’Acceptation dans Votre Quotidien

Pour transformer cette notion abstraite en habitude concrète, voici un plan d’action en quatre étapes, inspiré de principes de développement personnel et de sagesse spirituelle :

Cultivez la Prière et la Méditation Quotidienne : Commencez ou terminez votre journée par un moment de silence dédié à Dieu. Posez-vous la question : « Quelle est ta volonté pour moi aujourd’hui ? » Utilisez des affirmations comme « Je m’abandonne à ton plan parfait » pour reprogrammer votre esprit.

Identifiez et Challengez Vos Résistances : Tenez un journal où vous notez les situations où vous luttez contre les événements (ex. : « Pourquoi cela m’arrive-t-il ? »). Réfléchissez : est-ce une opportunité déguisée ? Des exercices de mindfulness, adaptés à une perspective croyante, peuvent aider à observer ces pensées sans jugement.

Cherchez des Signes et des Soutiens : Lisez les Écritures ou des témoignages de croyants qui ont traversé des épreuves similaires. Rejoignez une communauté de foi – groupe de prière ou forum en ligne – pour partager et recevoir du soutien. Souvenez-vous que la volonté divine se révèle souvent à travers les circonstances et les conseils des autres.

Pratiquez la Gratitude Active : Chaque soir, listez trois choses pour lesquelles vous remerciez Dieu, même dans les difficultés. Cela renforce l’acceptation en focalisant sur les bienfaits cachés, comme le dit Proverbes 3:5-6 : « Confie-toi en l’Éternel de tout ton cœur, et ne t’appuie pas sur ta propre intelligence ; reconnais-le dans toutes tes voies, et il aplanira tes sentiers. »

    Un Engagement Libérateur

    Accepter la volonté divine n’est pas une fin en soi, mais le début d’une vie plus alignée et épanouie. Pour un croyant, c’est l’ultime acte de foi : confier son destin à Celui qui sait mieux. Bien sûr, cela demande du courage et de la pratique, mais les récompenses – paix, force intérieure et croissance – en valent la peine. Si vous traversez une période difficile, rappelez-vous : ce qui semble être un obstacle pourrait être le pont vers une version meilleure de vous-même.

    Et vous, quelle expérience avez-vous avec l’acceptation de la volonté divine ? Partagez dans les commentaires pour enrichir notre communauté. Que la paix de Dieu vous accompagne dans ce voyage personnel.

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    Développement personnel

    Résumé du livre : La peur des autres ( 1ere partie )

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    Résumé de « La peur des autres : trac, timidité, phobie sociale » de Christophe André et Patrick Légeron : un livre d’introduction à la psychologie de la « peur de l’autre » à la fois très bien argumenté et très bien documenté — par deux des plus grands spécialistes les plus réputés du domaine en France !

    Ce livre pose la question de l’anxiété sociale, une peur largement répandue qui est liée au regard des autres. Elle peut se manifester lors de situations courantes, comme parler en public par exemple. Elle peut non seulement entraîner de la gêne, mais aussi de l’inconfort persistant, voire un repli sur soi.

    L’anxiété sociale, parfois appelée phobie sociale, prend différentes formes, plus ou moins problématiques.

    Tous ces éléments jouent un rôle. De manière générale, cette anxiété est intimement liée à notre perception du regard des autres.

    Imaginer la disparition de l’anxiété sociale paraît utopique : le jugement d’autrui est une réalité sociale bien présente. Pourtant, elle pourrait être atténuée par plus de franchise et d’honnêteté dans nos rapports.

    Il existe des solutions efficaces pour traiter l’anxiété sociale. Les thérapies cognitives et comportementales, ainsi que certains médicaments, apportent une aide précieuse.

    Le but de cet ouvrage est d’expliquer ces peurs et de guider chacun vers un mieux-être.

    PREMIÈRE PARTIE – Nos peurs sociales et leurs manifestations

    Chapitre 1 – Des situations et des hommes

    Des situations sociales dérangeantes

    Certaines situations sociales génèrent de la gêne, comme parler en public ou être observé. La majorité des gens ressentent de l’appréhension face à ces moments. Parmi les peurs les plus fréquentes, parler en public figure en première place, avec 51 % des Français concernés. Cette peur est aussi commune que celles des serpents et du vide.

    Mais d’autres situations plus banales — liées à des interactions sociales quotidiennes — peuvent être tout aussi gênantes pour certaines personnes. L’absence de menace réelle rend ces moments d’anxiété sociale d’autant plus frustrants. Les personnes affectées par cette anxiété se questionnent souvent sur la raison de leur réaction, sans trouver de réponse claire.

    Une vieille histoire

    Dans l’Odyssée d’Homère, Ulysse est intimidé avant de rencontrer le roi Alkinoos. Cette anxiété sociale touche donc même les plus courageux ! D’ailleurs, de nombreux autres exemples littéraires (Rousseau, Baudelaire, etc.) illustrent ce type d’émotion.

    Bien sûr, les médecins se sont aussi intéressés à ces phobies sociales. Pierre Janet les décrit dès 1909, évoquant la peur de parler en public ou de certaines interactions sociales. Aujourd’hui, chercheurs et médecins étudient ces mécanismes et cherchent à expliquer pourquoi nous ressentons cette gêne.

    Les situations en cause

    L’anxiété sociale nécessite la présence d’autrui. Robinson Crusoé ne ressent pas cette émotion, du moins jusqu’à l’arrivée de Vendredi… Dès que nous avons des interlocuteurs, les conditions sont réunies pour éprouver de l’anxiété.

    Certaines situations sont particulièrement génératrices d’appréhension, comme le regard d’un groupe ou la rencontre de nouvelles personnes. Les travaux sur l’anxiété sociale sévère identifient quatre grandes catégories de situations redoutées. Ces catégories permettent de mieux comprendre les circonstances provoquant cette gêne sociale. Passons-les en revue.

    1 — L’anxiété de performance

    Les situations sociales les plus redoutées impliquent la prise de parole en présence d’un public. L’anxiété est exacerbée par la crainte du jugement et de l’évaluation de ses compétences. Cela concerne non seulement les prises de parole en groupe, mais aussi les entretiens individuels formalisés.

    Les situations anxiogènes peuvent être classées selon leur degré d’interactivité. Certaines personnes redoutent les interactions directes, d’autres préfèrent éviter les situations sans réponse du public. Cette anxiété peut empêcher les individus de s’exprimer, de prendre des décisions ou de progresser dans leur carrière.

    L’anxiété de performance est fréquente chez les enseignants, artistes et sportifs. Ils peuvent ressentir une appréhension incontrôlée avant leurs prestations. Les enseignants, par exemple, craignent de ne pas « tenir leur classe ». Le trac est certes vu comme un signe de talent, mais il peut aussi devenir paralysant, forçant certains artistes ou sportifs à abandonner leur carrière.

    2 — Les situations d’échange et de contact

    L’anxiété sociale n’est pas seulement liée à une prestation en public. Elle peut survenir dans des interactions sociales où aucun jugement de performance n’est en jeu. Ces situations incluent des échanges superficiels avec des inconnus ou des discussions avec des personnes connues.

    Certaines personnes, comme Rémi ou Édith (cités dans l’ouvrage), redoutent les conversations prolongées, ne sachant pas quoi dire après les salutations initiales. Marie-Odile craint de devoir échanger avec des inconnus, tandis que Patrice préfère éviter les interactions banales avec les commerçants.

    L’anxiété dans ces interactions est liée à la peur de dévoiler une intimité indésirable ou d’être jugé sur sa véritable valeur. Certaines personnes, comme Catherine, se sentent plus à l’aise lors de premières rencontres, mais redoutent les interactions répétées. Les craintes gravitent autour de la peur de montrer ses manques, de révéler un secret culpabilisant, ou d’afficher un comportement jugé « bizarre » par autrui.

    3 — Les situations où il faut s’affirmer

    S’affirmer implique de défendre ses droits et d’exprimer ses besoins. L’anxiété sociale complique souvent ces situations, notamment lorsqu’il s’agit de dire non, de demander quelque chose, ou d’exprimer un désaccord.

    Certaines personnes — comme un patient plombier évoqué par les auteurs — ont des difficultés à réclamer leur dû, ce qui peut avoir de lourdes conséquences financières. D’autres, comme une assistante sociale, préfèrent acheter un vêtement qu’elles n’aiment pas plutôt que de quitter un magasin sans rien acheter, par peur du jugement des vendeurs.

    La crainte de la réaction d’autrui explique ces difficultés à s’affirmer. Beaucoup redoutent de contrarier ou de provoquer une réaction négative. Cette anxiété peut même empêcher des actions nécessaires, comme annoncer une mauvaise nouvelle.

    4 — Le regard d’autrui

    Un simple regard peut parfois provoquer un malaise, même lors d’actes banals. Cela inclut marcher sous les yeux d’autres personnes, écrire ou jouer d’un instrument lorsqu’on est observé.

    Certaines personnes redoutent tellement ce regard qu’elles évitent systématiquement ces situations. Par exemple, un étudiant préfère arriver en avance et rester jusqu’à la fin pour ne pas être remarqué. Une employée de ministère évite de s’asseoir près de ceux qui prendront la parole en réunion pour ne pas attirer l’attention.

    Ce malaise face au regard d’autrui est un comportement observé dans le règne animal, lié à la dominance. Chez l’humain, ce phénomène est présent, mais devient problématique lorsqu’il engendre des comportements d’évitement systématiques.

    Une hiérarchie de nos peurs sociales ?

    Moins de 10 % des personnes ne ressentent jamais d’anxiété sociale dans aucune des situations décrites. Les situations anxiogènes varient d’une personne à l’autre : certains craignent d’être observés en train de faire un créneau, tandis que d’autres redoutent de parler en public.

    Les différentes situations anxiogènes peuvent être représentées sous forme de pyramide. La base représente les peurs les plus courantes, et chaque niveau supérieur inclut les craintes des niveaux inférieurs. Par exemple, la peur de se dévoiler implique souvent la crainte d’accomplir une prestation sous le regard d’un groupe. La crainte d’être observé est souvent liée à toutes les autres peurs.

    Ces différentes craintes peuvent coexister dans une même situation. Par exemple, un écrivain invité à une émission de télévision doit faire face à l’anxiété de la performance en public, à la peur de se dévoiler lors de questions personnelles, à la nécessité de s’affirmer sans paraître hostile, et à la crainte d’être observé de près par les caméras.

    Un mécanisme commun

    Toutes ces situations ont un point commun : elles exposent au regard et au jugement des autres. L’anxiété sociale est souvent perçue comme une anxiété d’évaluation. Toutes les situations où nous sommes évalués, même à l’écrit, peuvent provoquer de l’anxiété.

    Lorsqu’une anxiété d’évaluation se combine au regard direct d’autrui, elle se transforme en anxiété sociale. Cette peur s’exprime par des manifestations émotionnelles, comportementales et cognitives, que nous allons explorer en détail.

    Chapitre 2 – Le tumulte du corps

    Les mots de l’angoisse

    La première conséquence ressentie par une personne souffrant d’anxiété sociale est souvent le tumulte physique. Les manifestations corporelles sont au cœur de l’angoisse et en sont les signes les plus visibles.

    Ces expressions soulignent que l’anxiété sociale s’accompagne principalement de symptômes corporels, qui traduisent le malaise ressenti.

    Un inventaire à la Prévert

    Les symptômes de l’anxiété sociale sont nombreux et variés, incluant :

    Ce qui se voit et ce qui ne se voit pas

    Ces symptômes peuvent être divisés en deux groupes :

    1. Ceux qui sont internes, comme les palpitations ou les mains moites ;
    2. Ceux qui sont visibles, tels que les tremblements ou le rougissement.

    Les symptômes visibles sont souvent les plus redoutés car ils révèlent notre malaise aux autres, ce qui est gênant dans les situations sociales.

    L’intensité de ces manifestations varie. Pour certains, elles sont discrètes, tandis que pour d’autres, elles peuvent atteindre un paroxysme, provoquant même des attaques de panique. Ces symptômes peuvent sérieusement affecter les interactions sociales et la qualité de vie, comme en témoignent les personnes qui évitent les situations où leur anxiété risque de se manifester de manière trop visible.

    La trahison du corps

    L’émergence soudaine des symptômes physiques d’anxiété sociale pose de nombreux problèmes. Une fois enclenchés, il est difficile de les arrêter, et se concentrer dessus peut aggraver la situation. La lisibilité de nos émotions sous le regard des autres accroît notre vulnérabilité, rendant l’expérience encore plus stressante.

    Cette gêne face au regard d’autrui, souvent perçue comme une évaluation, est courante et peut devenir une obsession, générant une spirale d’anxiété. Le poème de Claude Roy cité par les auteurs illustre bien ce malaise, où la personne se sent exposée, déstabilisée par l’attention des autres.

    Le phénomène de « peur de la peur« , décrit par le dramaturge et romancier Tennessee Williams, illustre comment la crainte de revivre ces symptômes d’anxiété peut devenir une prophétie autoréalisatrice. Cette anticipation négative crée un conditionnement qui renforce l’anxiété lors des futures interactions.

    Tu as rougi !

    L’anxiété sociale présente des manifestations physiologiques spécifiques, telles que le rougissement, qui est au centre des préoccupations de nombreuses personnes. La peur de rougir, appelée éreutophobie, peut aggraver le rougissement en raison de l’anticipation anxieuse.

    Certaines personnes ont une grande facilité à rougir (érythrose) sans être éreutophobes. Pour les éreutophobes, la crainte de rougir devient une obsession, amplifiant ainsi la réaction. Le rougissement est souvent perçu comme une révélation involontaire de son état émotionnel, rendant la situation encore plus difficile à gérer.

    Le rougissement peut survenir dans des situations variées, souvent en lien avec le regard des autres. L’anticipation de ce rougissement peut déclencher une spirale de gêne et de malaise. Certains, pour échapper à ce malaise, envisagent même des interventions chirurgicales, bien que ces opérations ne soient pas toujours efficaces et comportent des risques importants.

    Les réactions physiologiques d’émotivité ont-elles un sens ?

    Les manifestations physiques de l’anxiété, comme le rougissement, sont des réactions de stress héritées de nos ancêtres. Lorsque confronté à une situation stressante, le corps se prépare à combattre ou fuir, déclenchant la libération d’adrénaline et d’autres hormones.

    Cela provoque l’accélération du cœur, la respiration rapide, et la dilatation des vaisseaux sanguins, préparant les muscles à l’action. Ces réactions, autrefois utiles face aux dangers physiques, deviennent aujourd’hui un obstacle dans des situations stressantes symboliques, comme les interactions sociales.

    Le rougissement peut, pour certaines personnes, être perçu comme une vulnérabilité, les exposant aux moqueries. Toutefois, dans d’autres cas, comme pour les comédiens ou les sportifs, le stress et les réactions physiologiques peuvent agir comme un stimulant, améliorant la performance jusqu’à un certain seuil, au-delà duquel il devient paralysant.

    La réaction émotionnelle à l’anxiété sociale varie d’une personne à l’autre. Certaines sont stimulées par le stress, tandis que d’autres sont dépassées par celui-ci. Les normes culturelles jouent également un rôle : autrefois, l’émotivité était mieux acceptée, tandis qu’aujourd’hui, le contrôle de soi est valorisé, ce qui renforce la pression sur les personnes anxieuses.

    Chapitre 3 – Les désordres du comportement

    Panique à bord !

    L’anxiété sociale peut désorganiser les capacités relationnelles en provoquant deux réactions principales : la fébrilité et la sidération.

    Ces deux tendances, fébrilité et sidération, reflètent les grandes réactions face au stress : tenter de prendre le contrôle ou, au contraire, se résigner et subir. Ces comportements peuvent altérer les performances sociales en rendant les gestes raides, les pensées incontrôlables ou en provoquant un engourdissement mental, empêchant toute réaction appropriée.

    Courage, fuyons !

    Lorsque l’anxiété sociale devient trop forte, les individus ont tendance à éviter les situations qui leur causent du stress. Cet évitement, s’il est compréhensible, peut à terme restreindre leur vie sociale et les empêcher de saisir des opportunités importantes, telles qu’une promotion ou une rencontre amoureuse. L’évitement subtil, comme éviter le contact visuel ou limiter les interactions verbales, est une autre stratégie courante qui entretient malheureusement l’anxiété.

    L’échappement, ou la fuite physique d’une situation stressante, est une réponse plus extrême. Cette réaction, bien que temporairement soulageante, a souvent des conséquences embarrassantes, comme en témoigne l’histoire de la patiente qui a quitté précipitamment un opticien.

    Parfois, au lieu de fuir, certains adoptent un comportement opposé, devenant exagérément familiers ou utilisant l’humour pour détourner l’attention de leur anxiété.

    Certaines personnes adoptent des comportements pour « se donner de la contenance« , comme allumer une cigarette ou manipuler des objets. Ces actions, bien qu’elles apaisent temporairement l’anxiété, contribuent à renforcer les mauvaises habitudes et à masquer leur véritable malaise. Les lunettes, par exemple, peuvent être utilisées comme un bouclier symbolique pour se protéger du regard d’autrui.

    Le hérisson et le paillasson

    L’anxiété sociale peut perturber le style relationnel de la personne en générant soit une inhibition excessive, soit une agressivité inappropriée. Les personnes anxieuses peuvent avoir des idées ou des désirs qu’elles n’expriment pas, ou au contraire adopter un ton autoritaire pour masquer leur manque de confiance. Cette dynamique est souvent le résultat du stress qui pousse à fuir ou à combattre.

    Certains, comme le médecin à l’aise avec ses patients mais mal à l’aise avec les femmes, deviennent inhibés dans certaines situations. D’autres, comme l’artiste qui n’ose pas parler d’argent, alternent entre inhibition et moments de frustration où l’agressivité émerge. Les comportements oscillent entre une posture de soumission (« paillasson ») et une posture de défense (« hérisson »), selon les attentes perçues des autres et le contexte.

    Cette dualité est illustrée par Proust avec le personnage du docteur Cottard, qui alterne entre timidité excessive et froideur. Rousseau décrit aussi dans ses « Confessions » comment il a adopté une façade cynique et caustique pour masquer sa timidité et éviter de se sentir vulnérable. Ces stratégies sont souvent utilisées pour se protéger de l’anxiété sociale et maintenir un semblant de contrôle sur les interactions.

    Des chaînes invisibles…

    L’anxiété sociale peut profondément affecter la vie quotidienne des personnes concernées, créant un cercle vicieux : plus on évite une situation, plus elle devient redoutée.

    Derrière ces conduites d’évitement se cache une vision anxiogène du monde et des rapports humains, où chaque interaction devient une source potentielle de stress et de jugement. Cette perception crée une barrière qui limite les expériences et les relations, enfermant les personnes anxieuses dans une vision réductrice et menaçante des interactions sociales.

    Chapitre 4 – Tempête sous un crâne

    Le hit-parade des pensées négatives

    L’anxiété sociale est liée à des perceptions spécifiques de soi-même et du monde environnant. Les pensées automatiques, ou « cognitions », jouent un rôle crucial dans l’anxiété sociale. Ces pensées sont souvent négatives et apparaissent instantanément face à des situations redoutées, constituant un monologue intérieur qui influence les comportements et les émotions.

    Un jugement négatif sur soi

    L’anxiété sociale est souvent associée à une vision négative de soi-même et de ses performances. Les personnes souffrant d’anxiété sociale ont tendance à se focaliser sur ce qui, selon elles, ne va pas dans leur comportement, puis à accorder une importance excessive à ces éléments négatifs, souvent en s’autodévalorisant de manière globale et définitive.

    Un exemple illustre bien ce mécanisme : un patient, lors d’un entretien d’embauche, avait plaisanté sur les habitants du Sud de la France, et s’était ensuite angoissé à l’idée que l’interlocuteur puisse être de cette région. Il a ruminé sur cet incident, l’estimant catastrophique, malgré le reste de l’entretien qui s’était bien passé. Finalement, il fut embauché, et l’interlocuteur, bien que Marseillais, n’avait même pas relevé la plaisanterie.

    L’estime de soi, qui représente les jugements sur nos compétences, est souvent faible chez les personnes souffrant d’anxiété sociale. Cette estime de soi basse les pousse à se fixer des objectifs irréalistes et à être extrêmement critiques envers elles-mêmes.

    Même lorsque des retours positifs leur sont donnés, elles peuvent les percevoir de manière négative, les prenant pour de la condescendance ou de la pitié. Cela crée une boucle qui entretient l’anxiété, avec une vision biaisée de soi-même qui rend difficile l’accès aux encouragements extérieurs, surtout dans les formes sévères d’anxiété sociale.

    La peur du jugement d’autrui

    L’anxiété sociale est souvent associée à une préoccupation excessive du regard des autres, notamment sur soi-même et ses actions. Les personnes souffrant d’anxiété sociale se demandent constamment : « Que pense-t-on de moi ? », et répondent systématiquement de manière négative. Cette préoccupation constante crée un schéma de pensées où chaque interaction est perçue comme une évaluation négative, renforçant la peur et le malaise.

    Ces cognitions dysfonctionnelles, décrites par Rousseau comme une « vivacité de sentir » couplée à une « lenteur de penser », conduisent l’individu à se sentir vulnérable et jugé négativement dans toutes les situations sociales. Tout geste ambigu est interprété de façon défavorable, qu’il s’agisse de critiques mineures perçues comme un rejet complet, ou de simples froncements de sourcils vus comme des marques de désaccord.

    Les études en psychologie expérimentale montrent que les personnes souffrant d’anxiété sociale réagissent de manière disproportionnée aux visages perçus comme hostiles, même lorsque les expressions sont neutres. Lors de prises de parole en public, les anxieux sociaux détectent plus rapidement les signes de désapprobation parmi les auditeurs, et se sentent perturbés par eux, contrairement aux personnes moins anxieuses qui sont plus sensibles aux signes d’approbation.

    En outre, les situations ambiguës sont systématiquement interprétées de manière négative, qu’il s’agisse d’amis quittant une soirée plus tôt ou d’un interlocuteur qui reste silencieux. Les anxieux sociaux ont également du mal à lire les émotions des autres, percevant souvent des signes hostiles là où il n’y en a pas, renforçant ainsi leur sentiment d’inadéquation et d’insécurité dans les interactions sociales.

    La crainte des réactions d’autrui

    L’anxiété sociale est souvent exacerbée par une crainte excessive des réactions des autres, surtout lorsque ces réactions sont inconnues ou imprévisibles. C’est pourquoi les situations impliquant des inconnus ou des groupes sont particulièrement angoissantes pour les anxieux sociaux.

    Cette crainte des réponses hostiles amène les personnes anxieuses à percevoir leurs semblables comme potentiellement agressifs, imaginant systématiquement des réactions négatives à leurs actions. Par exemple, demander à un serveur de restaurant de changer un plat ou demander à un voisin de baisser le son deviennent des épreuves redoutées car elles sont perçues comme susceptibles de déclencher des conflits.

    L’anticipation anxieuse, ou comment se raconter des films catastrophes à longueur de journée

    L’anxiété d’anticipation joue un rôle central dans l’anxiété sociale. Les personnes anxieuses ont tendance à se raconter des « films catastrophes » en anticipant systématiquement les pires scénarios possibles. Ces scénarios se construisent autour de véritables enchaînements catastrophiques, où chaque élément négatif alimente le suivant.

    Par exemple, un individu invité à un cocktail peut imaginer que s’il prend un verre, il va trembler, ce qui attirera les regards et les jugements des autres, renforçant son image de quelqu’un de faible et peu fiable.

    Les situations où l’anxiété sociale atteint son paroxysme sont celles où la personne se sent piégée, quel que soit son choix.

    Un autre patient décrit, par exemple, sa peur lorsqu’il se retrouve seul dans un groupe inconnu : s’il prend la parole, il craint d’être jugé inconvenant, et s’il se tait, il pense être perçu comme introverti ou incapable de communiquer.

    Ces scénarios de déroute résistent souvent aux faits, même lorsque ceux-ci montrent que les pires craintes ne se sont pas réalisées, illustrant à quel point ces anticipations négatives peuvent être tenaces et difficiles à déconstruire.

    Anxiété toujours !

    L’anxiété sociale peut altérer les processus cognitifs de façon durable à travers les trois phases temporelles d’une situation stressante : avant, pendant et après.

    1. Quand la peur influence la réalité

    Ce cycle de pensées négatives, connu sous le nom de « prophéties autoréalisées » ou « autoréalisatrices », fait que la peur finit par influencer la réalité. En anticipant le pire et en focalisant sur ses propres symptômes d’anxiété, la personne augmente la probabilité que ces symptômes se produisent effectivement, confirmant ainsi ses craintes initiales. Cela rend encore plus difficile la rupture de ce cercle vicieux, car chaque situation sociale renforce la vision négative qu’elle a d’elle-même.

    L’intensité de l’anxiété sociale et la capacité de la personne à y faire face varient. Certaines personnes peuvent maintenir une certaine distance par rapport à leurs peurs, voire en rire, et parviennent à s’améliorer progressivement. Pour d’autres, l’anxiété est si intense qu’elle devient paralysante, entraînant une souffrance et un handicap dans leur vie quotidienne.

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